Samia, où es-tu ?
“La suprême ironie de la vie c’est que nul n’en sort vivant.”
Je rejoins le poste de police le plus proche en moins de dix minutes. L’ambiance surchauffée par les lumières des néons, combinée à l’affluence en ce vendredi soir, m’évoque les films de Fellini. Une multitude d’individus étranges, allant des touristes hagards aux camés hallucinés, s’agitent dans l’espace confiné qui sert de salle d’attente.
Lorsque mon tour arrive, je m’empresse de suivre l’agent à son bureau, contente d’échapper au regard d’une dame âgée et édentée, qui me fixe en ricanant. J’effectue ma déposition le plus soigneusement possible. Mon interlocuteur sourcille à peine à l’évocation du possible lien avec le boucher de Noho. Il m’écoute en sirotant un gigantesque seau de soda, sans montrer le moindre signe d’émotion. Je m’efforce de lui donner la meilleure description de mon amie, et je suis un brin rassurée quand il me demande si je peux lui laisser une photo d’elle. Il ne peut s’empêcher de lâcher: "Elle est aussi blonde que les autres victimes. Qu'aviez-vous dit déjà? Qu'elle a pris une voiture en compagnie d'un dénommé Leo avant-hier soir?"
Quelques instants plus tard, je rejoins le penthouse désert de Reza, abattue et affligée. Samia m’aura valu deux visites chez les flics en l’intervalle de deux mois. J’espère que ceux-ci retrouveront mon amie saine et sauve, contrairement au sort de sa valise encore perdue jusqu’à ce jour. Oh, mon Dieu, faites qu’elle ait tout simplement dénicher un nouveau fiancé, encore plus riche que le précèdent.